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Durer n’est plus suffisant…

«Plus on est conformiste, plus on est dangereux.»

Mine de rien, il le balance.
Il porte une barbiche et un costard. Il échange avec une voix posée aux accents normatifs et semble appartenir à une classe intello lointaine…
Les plus libres ne sont pas toujours les plus spectaculaires.

Albert Jacquard.

Ce grand-papunk (vouiii j’aurais aimé l’adopter! Le rencontrer d’abord, l’adopter ensuite! 😉 a étudié beaucoup, s’est conformé souvent et refusé tout autant. Il s’est construit en se heurtant, en observant, en collaborant surtout et en se détournant de ses propres évidences. Il a marché l’époque, la sienne et la nôtre, en planquant ses yeux dans ceux de l’espoir et de la suite. Il a su gardé ses idées en mouvement, son utopie vivante et émancipée de tout cynisme.

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Mon utopie

Ce livre a beaucoup inspiré l’orientation alternative de nos choix familiaux en matière d’éducation (entre autre). Barbouillé, griffonné. Je le (re) lis comme je lui parlerais.

Alors que fils I s’endormait encore dans une poussette et que le quartier ne pullulait pas de petits cafés et de bars courus (0 nostalgie, juste un constat pour se mettre les pieds à la bonne place sur la TL), assise au Parc Morgan, la face dans le soleil, entre un kit de canettes, un mec en costume d’anarchiste et un vieillard endormi (qui avait vidé les canettes…), j’ai rencontré, pour la première fois, les idées immenses d’Albert Jacquard.

Ce livre, que je relis aujourd’hui, nourrit à nouveau ma réflexion et stimule aussi l’évolution du document fondateur de Sur le Fil, Fondation pour l’Inclusion.

«Il faut mettre la société au service de l’école; pas l’école au service de la société. Il faut être au service de l’intelligence qui évolue et rappeler aux êtres qu’ils se construiront grâce aux autres, en collaboration et non pas en compétition.»

Ensemble.

Je suis les liens que je tisse; cette interdépendance globale, et non pas seulement propre à notre espèce, est bénéfique. Lorsque nous le reconnaissons, notre vulnérabilité devient constructive. En fait, je crois profondément que cette vulnérabilité est magnifique et nécessaire…

Humblement humain, nos limites sont franchissables par la confrontation, l’audace, l’entraide et au contact des failles & forces de l’autre. Au contact de la différence…

L’éducation en tant que valeur prioritaire, fondement du nous ou en tant que système?

Le système m’apparaît désormais comme une entité-point de fuite- qui nous permet de justifier notre déresponsabilisation et inaction collective face à une valeur qui nous appartient et nous définit.

Alors que nous tendons vers la performance, que l’éducation réclame un ralentissement, des câlins et beaucoup d’investissements, que nos institutions moisissent et qu’elles témoignent de notre désintérêt (de nous même, de la suite?), rêver, proposer et agir devient d’autant plus nécessaire.

L’éducation devrait-elle subordonner ou inspirer? Que faire des atypies, qui deviennent, de plus en plus, la norme?
Ne devrions-nous pas éviter de reprendre systématiquement le modèle parce qu’il a fait ses preuves une fois. Sans nier les bénéfices de l’expérience et la valeur de certains éléments des structures en place, acceptons l’inconfort et le chaos que génèrent l’essai et la nouveauté. Osons la collaboration, la vulnérabilité et l’incertitude.

Sur le fil, l’équilibre se négocie à chaque respiration, chaque pas, et on est une gang en suspend…
«Durer, n’est plus suffisant…»

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Il a peint des taches…

Hier.
Sans rancune.

Les ongles de fils I étaient acérés. Les cris stridents. L’équilibre incertain.
Le petit fil tordu…
On avait les conséquences de certaines caractéristiques de l’autisme dans l’tapis…

PORTRAIT_DE_FIL_DE_FER Danielle Orcier

Il y a de ces matins où, malgré les horaires visuels et la constante volonté, l’anarchie domine.
Hum…en fait, nos matins ressemblent rarement à une pub de Nutella.
Pas de sucre, pas de peanut, pas de poésie lichée ni de maman sans miette. Une heure happée par la routine-Everest d’habillage et les prises de lutte qui s’achèvent avec de la pâte à dents aux cerises dans le brushing.

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Déterminés à arriver à l’heure à l’école,  on a ‘paqueté la famille et on l’a jetée dans la Lisette-mobile (aka notre voiture).
Le boupi (fils II) errait en cavale parmi les agendas et les projets. Fils I, sans mot, jugea que le moment était idéal pour un affaissement anxieux…
Nos intentions étaient sans effet. Des parents dans une flaque d’amour, pas de pogne.

En moins de temps qu’il ne faut pour lever un bras, trois faces (dont la mienne) ont hérité d’égratignures.

Nous avons apaisé le tigre, géré les conséquences et formulé des pardons.

De petits humains, aimants, ouverts mais attristés se tenaient toutefois toujours devant nous.
Avec l’adorable enseignante, Isabelle, nous avons ouvert le dialogue. Nous avons profité de notre présence pour permettre aux enfants de témoigner de leur vécu, poser leurs questions, exprimer leurs émotions, regarder le positif et réfléchir à des possibles. L’expérience était confrontante mais constructive surtout.

Éjectée de la classe, au moment où fils l’a suggéré en langage non verbal très efficace, j’ai laissé ma journée respecter ses dead line et le temps a filé.

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En fin d’après midi, une photo apparaît dans ma boite courriels:
« Il peint des taches. Vois comme il est beau! » C’est elle qui le dit.

Émue je répond à l’auteur. Isabelle. Cet être engagée, qui ne prend rien pour acquis et qui rend tout possible.

Tout est inévidence.
Nous doutons. Essayons. Je grince. Nous persistons.

Au moment de conclure mon mercredi dans le noir du presque jeudi, je zieute une dernière fois.
Un dernier courriel m’attend sagement:

« Moi aussi je suis maman… Aujourd’hui, il a peint des taches pour tous ses amis. Les amis ont ensuite créé des oeuvres à partir de celles-ci. Ils en feront un livre pour apprendre à compter, qu’ils remettront à Maël, à la suggestion de Philippe…à suivre! »

Ma journée s’est conclue toute seule. Pas d’effort. Comme une grande. Lucide et reconnaissante, j’ai dormi en répétant: Merci. Encore. La face liquide.

L’inclusion n’a rien d’évident et sa beauté, comme la créativité, émergent dans les contraintes et les défis…

les amis créent un livre pour compter

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